Le tout présentiel a vécu. Les salles de cours aux tables en rang d’oignons ont vécu. Les longs tunnels de discours d’un sachant à des ignorants ont vécu.
Vous me direz, ils n’ont pas attendu l’explosion des outils numériques pour disparaître – et vous n’aurez pas tort. Mais s’il fallait une révolution pour définitivement déboulonner leur statut, c’est bien la révolution digitale qui s’y est collée.
Des modalités renouvelées
On peut ainsi noter une foule de dispositifs pour faire autrement ce qu’on a toujours fait, mais en mieux – naturellement. L’auteur et consultante américaine Jane Hart énumère chaque année non sans abnégation les principaux outils accessibles en ligne et s’est vue contrainte de doubler la taille de sa liste – tout en sachant que des dizaines attendent encore aux portillons.
Les formations en présentiel se voient agrémenter de solutions comme Kahoot, Plickers, Socrative, Klaxoon et tant d’autres afin de stimuler les interactions et, au passage, d’éviter que les apprenants ne se distraient avec leur mobile. Le vieux tableau blanc devient interactif, partagé et accessible de partout (comme le propose Google avec son Jamboard) et la collaboration s’accroît.
Aux formats en salle peuvent se substituer des webinaires, des classes virtuelles ou des dispositifs qui combinent plusieurs approches tels les Mooc. Des programmes multimodaux incluent des ateliers façon workshops ou fablabs et des modules de microlearning, de la vidéo (classique, en motion design ou dessinée) ou des objets plus courants (fiches, infographies…).
Une bonne dose d’interactions vient enrichir le tout, tantôt guidées avec des tuteurs ou des coaches, tantôt impulsées par des community managers et tantôt libres et informelles au sein d’espaces collaboratifs et de réseaux sociaux d’entreprise.
Des plateformes plus ou moins reliées avec le SIRH et en phase avec les enjeux de gestion des talents, ouvertes sur les échanges des apprenants et dopées à la gamification permettent de créer des expériences utilisateurs uniques.
S’appuyant sur de nouveaux standards (xAPI), l’architecture technologique de nouvelle génération offre des possibilités inouïes en termes de remontée d’informations et de suivi des activités de l’apprenant.
Des modèles économiques en question
Mais comme dans toute période de révolution, tant que les cartes sont battues, la partie n’est pas finie et les joueurs continuent de miser sans vraiment savoir où leur jeu les mènera. C’est ainsi qu’un certain nombre d’acteurs se rendent compte que le modèle économique sur lequel ils s’appuyaient n’est pas totalement viable.
Les agences digital learning ont troqué un effectif incompatible avec la souplesse requise pour des cohortes de mercenaires free-lances. Les éditeurs qui rêvaient de vendre des modules sur étagères comme d’aucuns des produits de grande consommation ont compris pour les uns que leur intérêt résidait dans la réalisation de prestations sur mesure et pour les autres dans la vente d’applications. Les plateformes qui tablaient sur des systèmes ouverts et massifs se mettent à monnayer leur expertise, proposant de la certification à petit prix ou quittant le monde académique pour signer des partenariats avec de grands groupes. Certains, enfin, ne sachant encore comment valoriser leur solution, la laisse en accès libre en attendant que le marché soit mûr pour une exploitation rentable.
Le bouillonnement actuel va petit à petit donner naissance à des acteurs majeurs, LinkedIn qui avait racheté Lynda pour un montant record venant par exemple de lancer sa solution de formation intégrée – et le mouvement ne fait que commencer.
Au-delà de la formation
La révolution digitale concerne toutes les dimensions de l’apprentissage, qu’il soit solitaire, en tête-à-tête ou en groupe. Elle touche aussi bien les activités présentielles qu’à distance. Elle concerne les plateformes, les outils comme les données (d’ici à 2020, ce ne sont pas moins de 50 milliards d’appareils qui seront connectés entre eux). Elle transfère les pratiques privées dans la sphère professionnelle, favorisant échanges et activités. Elle touche au final toute l’entreprise et devrait contribuer à l’avènement de collaborateurs plus autonomes, plus responsables et plus créatifs – à condition bien sûr que les organisations sur lesquelles elle s’appuie leur soient propices.
Laurent Habart
Consultant et formateur indépendant
http://learning-sphere.com/fr/author/habart/
Publi-reportage - 03/11/2016